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Albanie : Une nouvelle nation bektachie prévue à Tirana
Lors d’un discours prononcé devant l’Assemblée générale des Nations unies à New York le 23 septembre 2024, le Premier ministre albanais, Edi Rama, a annoncé que son pays envisage de créer un État souverain pour les musulmans bektachis, similaire au Vatican. Cet État sera établi dans la capitale Tirana.
Edi Rama a expliqué que cette nation, la plus petite au monde, deviendra un foyer spirituel pour les musulmans bektachis, qui représentent, selon un rapport du journal français La Croix, la quatrième plus grande communauté religieuse en Albanie après les musulmans sunnites et les chrétiens orthodoxes et catholiques.
Le fait qu’un Premier ministre catholique déclare « qu’il va céder une partie de son pays pour créer un État musulman souverain tout en cherchant un soutien international pour sa reconnaissance », suscite interrogations et scepticisme. Rama lui-même a commenté : « Peut-être que tout le monde dira que je suis un fou, mais cela m’est égal, on l’a déjà dit auparavant ».
Démarche pour un État bektachi
Le Premier ministre albanais affirme que cette initiative vise à transformer le centre bektachi mondial à Tirana en un État souverain exemplifiant modération, tolérance et coexistence pacifique.
En réponse à cette annonce, la communauté bektachie à Tirana a exprimé son soutien et a déclaré dans un communiqué de presse qu’elle bénéficierait d’une souveraineté comparable à celle du Vatican.
Selon le rapport de La Croix publié le 24 septembre, la nationalité dans cet État futur sera accordée exclusivement aux membres du clergé bektachi et à ses fonctionnaires, dirigé par le leader de la communauté avec le soutien d’un conseil responsable des opérations religieuses et administratives.
Ce nouvel État occupera le même espace géographique que le centre bektachi actuel à Tirana, s’étendant sur environ dix hectares, soit environ un quart de la superficie du Vatican.
Un modèle de tolérance
Le leader bektachi, Edmond Brahimaj, connu sous le nom de Papa Mendi, un ancien officier de l’armée albanaise, se prépare à prendre la présidence de ce nouvel État. Une équipe d’experts travaille à l’élaboration de législations définissant le statut souverain de cette entité au sein de l’Albanie.
Dans un rapport, Sinclair cite Papa Mendi exprimant son optimisme quant à la reconnaissance par les États-Unis et d’autres pays occidentaux, déclarant : « Nous méritons un État, car nous sommes les seuls au monde à dire la vérité sur l’islam sans le mélanger à la politique ».
Caractéristiques de la communauté bektachie
La confrérie bektachie représente un mélange unique de soufisme, de chiisme et de christianisme. Elle est fondée sur une interprétation flexible du Coran, tout en intégrant des croyances traditionnelles antérieures à l’Islam.
Cette communauté considère que le Coran a deux niveaux de sens : l’externe (apparent) et l’interne (profond). Les bektachis prônent une approche libérale et accueillent différentes croyances, ce qui les rend distincts au sein de la communauté musulmane.
Contexte historique et défis
La confrérie bektachie a été fondée par Hajji Bektash Wali au XIIIe siècle et a gagné en influence au sein de l’armée ottomane. Cependant, son statut a été contesté au fil des siècles, notamment avec les politiques répressives d’Atatürk en 1925 et la répression par le régime communiste en Albanie.
Après la chute du régime communiste en 1990, les bektachis ont cherché à rétablir leur influence dans un contexte où l’islam sunnite prenait de l’ampleur, menant à des tensions au sein de la communauté musulmane albanaise.
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