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Les réflexions de Jean-Marc Daniel sur l’alchimie économique en France
Alors que le gouvernement Barnier finalise le projet de budget pour 2025, de nombreux membres de la gauche continuent de rêver d’une relance par la dépense publique, critiquant le tournant vers la rigueur. L’économiste et professeur émérite à l’ESCP, Jean-Marc Daniel, déplore la persistance des « alchimistes de l’économie ». Dans son livre Les nouvelles leçons d’histoire économique (Odile Jacob), il déconstruit les idées reçues et les propositions idéologiques qui, selon lui, empoisonnent le débat économique en France. Il propose même des pistes audacieuses, comme le rachat d’une partie de la dette par la Banque centrale, conditionné à un véritable assainissement des comptes.
L’héritage de Michel Chevalier
Dans son ouvrage, Jean-Marc Daniel fait souvent référence à Michel Chevalier, fervent défenseur du libre-échange et professeur au Collège de France au XIXe siècle. Chevalier soutenait que « la nation française brille par l’éclat et la fécondité de son imagination », une qualité appréciable dans les arts mais moins utile en économie. Pour Daniel, la pensée magique continue de dominer ce domaine aujourd’hui.
Il cite deux erreurs majeures que Chevalier avait identifiées : la confusion entre économie et alchimie et le fait de se focaliser uniquement sur les effets immédiats sans considérer les conséquences à long terme. En analysant l’industrie textile, Chevalier démontrait que le protectionnisme nuit non seulement aux consommateurs, mais également à des secteurs économiques entiers, provoquant ainsi des ripostes économiques de la part d’autres nations.
Une politique économique en danger
Pour Jean-Marc Daniel, la situation actuelle est alarmante, car les « alchimistes » se retrouvent désormais au pouvoir. Selon lui, l’État distribue du pouvoir d’achat sans équivalence en termes de production ou de travail, entraînant inflation et déficit commercial. Il souligne que cette logique repose sur une interprétation fallacieuse du keynésianisme, celle qui postule qu’il est possible de créer de la richesse simplement en dépensant.
La dette publique : une préoccupation oubliée ?
Avec une dette publique dépassant 3000 milliards d’euros, soit 112 % du PIB, Daniel s’interroge sur l’indifférence apparente face à ce fardeau. Il rappelle que des économistes tels que Turgot prônaient l’absence de banqueroute et ainsi que le remboursement fiable de la dette. Pour Daniel, cette hantise de la banqueroute s’est estompée, et il devient crucial de mettre en place un programme de réduction significatif des déficits.
L’exemple japonais et ses implications
Les partisans d’une « alchimie budgétaire » citent souvent le Japon, où la dette publique atteint 260 % du PIB. Daniel note que la force du Japon réside dans le fait qu’une part importante de sa dette est détenue par la Banque centrale, leur permettant ainsi de maintenir un excédent de la balance des paiements courants. Contrairement à la France, qui ne bénéficie pas d’une telle couverture.
Pour lui, il est impératif que la France apprenne de l’exemple japonais : en rachetant les dettes conjoncturelles tout en réduisant les déficits structurels, la France pourrait restaurer sa santé économique. Mais il avertit que, compte tenu des intérêts accumulés sur la dette, la situation reste critique.
Les inégalités et leur perception en France
Les inégalités sont souvent évoquées comme un sujet central en France. Daniel souligne que cela découle d’une perspective culturelle historique qui ne valorise pas le mérite. Ce regard sur les inégalités empêche un débat constructif sur le mérite et la productivité.
Il conclut en rappelant que le travail, l’épargne, la liberté et l’instruction sont les fondements économiques que Chevalier soulignait déjà. La France doit donc s’engager à équilibrer ses dépenses publiques tout en stimulant un environnement propice à l’investissement et à l’innovation.
Les nouvelles leçons d’histoire économique, Jean-Marc Daniel. Odile Jacob, 288 p., 23,90 €.