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Les conteneurs maritimes, solution à la crise du logement au Ghana ?
À un chantier de construction en périphérie d’Accra, la figure dynamique d’Eric Kwaku Gyimah dirige l’activité frénétique.
Chaussé de bottes robustes couvertes de poussière, son jean usé témoigne des nombreuses heures passées parmi le béton et l’acier, tandis qu’un gilet de haute visibilité drapé sur ses épaules.
Au milieu des conteneurs d’expédition empilés et du vrombissement des engins lourds, sa voix domine le bruit, donnant des directives à ses employés.
Pour lui, ce site n’est pas simplement un chantier de construction ; ici, les conteneurs maritimes abandonnés sont transformés en maisons respectueuses de l’environnement, offrant une solution potentielle à la crise du logement de ce pays d’Afrique de l’Ouest.
« Il s’agit plus que d’une affaire commerciale ; c’est un mouvement », déclare-t-il.
Eric Kwaku Gyimah avec un membre du personnel sur l’un de ses chantiers de construction près d’Accra, au Ghana [Courtoisie d’Eric Kwaku Gyimah]
Crise du logement au Ghana
La crise du logement au Ghana prend de l’ampleur depuis un certain temps. Le Service statistique du Ghana a signalé qu’environ six millions des 33 millions d’habitants du Ghana ont un besoin urgent de logements.
Certaines de ces personnes sont sans abri, mais la plupart vivent dans des bidonvilles dangereusement surpeuplés qui ont poussé au fil du temps en périphérie des grandes villes du Ghana. La population vivant dans les bidonvilles est passée de 5,5 millions en 2017 à 8,8 millions d’habitants d’ici 2020, dernier recensement des Nations Unies.
Une raison à cela est l’urbanisation rapide, alimentée à la fois par la migration des zones rurales vers les zones urbaines et la croissance naturelle de la population. À mesure que davantage de personnes déménagent dans les zones urbaines à la recherche d’opportunités économiques, la demande en logements dépasse l’offre disponible, conduisant à la prolifération des établissements informels et des bidonvilles.
De plus, les défis économiques et l’accès limité au financement ont empêché de nombreux Ghanéens d’acheter ou de construire des logements.
Une nouvelle approche
Ce nouveau projet vise non seulement à répondre au besoin immédiat de logement, mais aussi à présenter un modèle de vie plus abordable et durable.
« Alors que nous sommes confrontés au stupéfiant déficit de logements au Ghana, il est impératif de proposer plus que de simples structures ; nous devons offrir une vision de vie durable », déclare Gyimah.
« Nous ne fournissons pas seulement un abri, mais nous sauvegardons également l’environnement pour les générations futures. Tout en ouvrant la voie à des modèles de vie durable, nous aspirons à créer un impact durable, un foyer à la fois. »
La naissance d’une idée
Ayant grandi avec 17 frères et sœurs à Akim Swedru – à 180 km de la capitale, Accra, dans l’est du Ghana – Gyimah dit qu’il rêvait de devenir banquier ou artiste.
Mais l’intérêt de Gyimah pour la durabilité était profondément enraciné dans son éducation dans une région connue pour ses forêts tropicales, ses ruisseaux, ses collines et ses rivières. Il a observé la déforestation rapide et la destruction des habitats fauniques causées par la construction et l’exploitation minière illégale. Ainsi, malgré des études en finance et banque, il a décidé de suivre sa passion pour la menuiserie.
Accessibilité et durabilité
L’accessibilité est primordiale si son entreprise doit avoir un quelconque impact sur le besoin de logements au Ghana. Par conséquent, ses maisons s’adressent principalement aux particuliers et aux familles cherchant des solutions de vie abordables et durables. Le coût de ces logements varie en fonction du design, les options les plus simples allant de 7 000 à 10 000 dollars. « Ce montant est seulement pour la structure, hors ameublement », ajoute-t-il.
Des designs plus complexes avec cuisines entièrement équipées et salles de bains, répartis sur plusieurs étages, coûtent jusqu’à 35 000 dollars, mais, comparés à une conception traditionnelle en briques, ces logements coûtent tout de même beaucoup moins cher.
Innovation et durabilité
Selon l’Association des promoteurs immobiliers du Ghana, il peut coûter entre 50 000 et 70 000 dollars pour construire une nouvelle maison en briques de deux chambres.
Selon Ghana Property Centre, une maison d’une ou deux chambres dans la capitale, Accra, coûte environ 100 000 dollars. Une maison en conteneur maritime, en revanche, « est rentable par rapport aux structures traditionnelles en béton… Nous voulons permettre à un grand nombre de personnes de posséder des maisons au Ghana », explique Gyimah.
Controverse et critiques
L’approche de Gyimah a été critiquée par certains. Alors que les avantages environnementaux sont évidents, des experts en urbanisme affirment que des solutions comme celles-ci auront probablement un impact limité sur le problème du logement au Ghana. Il n’est pas non plus clair combien de temps ces types de maisons dureront, bien que Gyimah affirme qu’elles devraient durer aussi longtemps que les maisons conventionnelles tant qu’elles sont entretenues correctement.
« Même si la transformation de conteneurs maritimes en logements peut sembler être une solution innovante à la crise du logement au Ghana, nous devons l’aborder avec prudence », déclare Abrahim Sowah-Dei, urbaniste basé à Accra.
Le futur des conteneurs maritimes
Malgré ces préoccupations, Felix Asante, un père de famille de 45 ans, se dit extrêmement satisfait de sa nouvelle maison de trois chambres en conteneur maritime.
Vers de nouvelles solutions
En octobre 2023, le barrage d’Akosombo, un barrage hydroélectrique qui fournit de l’électricité à la plupart des 16 régions du Ghana ainsi qu’aux pays voisins du Togo et du Bénin, a cédé.
Situé sur la Volta dans la gorge d’Akosombo, dans le sud-est du Ghana, le barrage est sur le lac Volta, créé lors de sa construction.
Déplacé par la situation des victimes des inondations, Gyimah explore des moyens de tirer parti de son entreprise pour répondre au besoin pressant de solutions de logement pour les victimes déplacées. Il envisage de collaborer avec des organisations de gestion des catastrophes pour pionnier la construction de logements mobiles et décents pour les victimes déplacées.