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Lors de sa visite au tribunal de Bobigny, Didier Migaud, le nouveau garde des Sceaux, a pu constater les défis considérables auxquels la justice française fait face, notamment en matière de délinquance et de trafics. Ce déplacement, qui s’est déroulé le 10 octobre, a été l’occasion pour lui de défendre les principes de l’État de droit tout en s’engageant à lutter contre les réductions budgétaires de son ministère.
Un premier déplacement révélateur
Ce jeudi, Migaud a passé sept heures en face-à-face avec les magistrats du tribunal judiciaire de Bobigny, le deuxième tribunal de France. L’ambiance était sérieuse, et les rires rares. À Bobigny, il a été confronté à des réalités difficiles, notamment les effets des fortes déclarations du ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, quant à « rétablir l’ordre » dans le pays. Le ministre de la Justice a écouté attentivement les préoccupations exprimées par les juges et procureurs concernant l’évolution de la délinquance dans la région.
La réalité alarmante de la délinquance
La situation est préoccupante en Seine-Saint-Denis, que le procureur Éric Mathais a qualifiée de « département le plus criminogène de France ». Avec environ 100 gardes à vue chaque jour, et des incidents violents comme « des coups de couteau quotidiens », les magistrats de Bobigny ont fait part de leur inquiétude quant à la criminalité en forte augmentation.
La vice-procureure, Alice Dubernet, a évoqué des chiffres alarmants : « 12 homicides en bande organisée depuis le début de l’année et 93 tentatives d’homicide par arme à feu ». Ce constat a frappé le ministre, qui a noté que « 48 heures sans un coup de feu ne se produisent pas ». Les magistrats ont aussi exprimé un sentiment de surcharge face à l’augmentation des affaires.
Vers une justice plus adaptée?
Migaud a pris le temps d’écouter les propositions des juges concernant la délinquance des mineurs. Il a souligné l’importance de respecter les principes constitutionnels, affirmant que « la justice des mineurs n’est pas celle des majeurs ». Plusieurs magistrats ont mis en garde contre une éventuelle « comparution immédiate pour les mineurs », qui pourrait aggraver la désorganisation actuelle.
En fin de visite, le garde des Sceaux a remercié les magistrats pour leur travail acharné, affirmant que leurs retours seraient cruciaux pour défendre le budget du ministère de la Justice pour l’année 2025. Malgré une prévision initiale de réduction de 1,5 milliard d’euros, le gouvernement a finalement annoncé une baisse de 500 millions d’euros, laissant espérer un ajustement plus favorable.
Une préoccupation partagée
Le président du tribunal, Peimane Ghaleh-Marzban, a décrit Bobigny comme « une juridiction de combat » tout en attirant l’attention sur la nécessité d’améliorer les effectifs. Les magistrats spécialisés ont plaidé pour la création d’un pôle de lutte contre la criminalité organisée afin de concentrer les ressources sur ces problématiques pressantes.
Cette visite a été marquée par la nécessité d’une réponse collective et adaptée à la délinquance croissante, et Migaud a semblé déterminé à faire entendre la voix de la justice face aux défis qui l’attendent.
Déplacement de Didier Migaud à Bobigny le 10 octobre. CYRIL ZANNETTACCI. VU POUR LE NOUVEL OBS
Didier Migaud, garde des Sceaux, lors de son déplacement à Bobigny. CYRIL ZANNETTACCI. VU POUR LE NOUVEL OBS