Très peu connue, cette musaraigne recèle pourtant un trésor de l’évolution: une colonne vertébrale unique au monde.

Une colonne vertébrale hors du commun pour ce petit mammifère africain.
C’est une bestiole qui n’a l’air de rien. Une petite musaraigne africaine d’une douzaine de centimètres au très long nez. Pourtant, sous la peau du Scutisorex, au niveau de son dos, se niche une véritable incongruité de l’évolution: une colonne vertébrale totalement différente de celle qui nous équipe, nous humains. Beaucoup plus épaisse et aplatie, elle s’articule en plaques qui s’emboitent entre elles, lui conférant une sorte de carapace interne d’une robustesse étonnante! Le long du bassin du Congo se transmettent ainsi certaines histoires disant qu’il est possible se tenir debout sur le dos de ce petit mammifère sans qu’il en souffre.
« Scutisorex somereni » ©JULIAN KERBIS PETERHANS, FIELD MUSEUM
Deux chercheurs du Muséum d’Histoire Naturelle de Chicago (Etats-Unis) viennent de publier une étude en imagerie dans Proceedings of the Royal Society B. Ils ont passé au scanner tous les spécimens de cet animal présents dans leur collection : soit 13 de Scutisorex somereni et 3 de Scutisorex thori. En effet, seulement deux espèces de Scutisorex sont recensées dans le monde ! Et, d’ailleurs, avant 2013, une seule, S. somereni, était connue… Il fallut une publication dans les Biology Letters signée par une équipe internationale composée d’Américains, d’Africains, de Belges et d’un Allemand pour garnir cette maigre collection avec S. thori, un cousin proche vivant dans les mêmes coins et recoins des forêts tropicales humides du Congo. Et nommé ainsi en référence à la force légendaire du dieu nordique Thor. Car, cette dernière s’est également avérée être doté d’une épine dorsale hors du commun. Légèrement moins pourvue que celle de S.somereni -elle ne possède que 8 vertèbres lombaires quand son cousin en a 12-, la colonne de Scutisorex thori en possède toutefois les mêmes caractéristiques de résistance. « Mais pas exactement la même structure, analyse Christiane Denys, professeure au Muséum National d’Histoire Naturelle (Paris) et qui travaille sur l’évolution morphologique des petits mammifères africains. La comparaison des deux espèces, Scutisorex thori et Scutisorex somereni montre que celle de somereni est plus complexe. De plus, ses vertèbres sont davantage aplaties, comme s’il y avait une augmentation de cette tendance évolutive. »
Sur le papier, la région lombaire de la colonne vertébrale des Scutisorex paraît une meilleure alternative, plus résistante en tout cas, que celle qui équipe la majorité des mammifères. Pourtant, ce n’est pas celle qui a été “choisie“ par la sélection naturelle. « On peut estimer que les deux groupes se sont séparés voilà plusieurs millions d’années », calcule Christiane Denys. Des vestiges de cette échine (quasi) disparue sont retrouvés chez d’autres. « Un fossile datant du crétacé,Spinolestes xenarthrosus, comme souligné dans un article de Nature de 2015 possède cette même convergence anatomique. Mais également parmi des animaux actuels comme les xénarthres, un ordre auquel appartiennent les tatous, qui ont également des vertèbres s’emboitant les unes dans les autres. Certes, pas de façon aussi poussée que les Scutisorex… »
Epines dorsales comparées de Crocidura olivieri (musaraigne géante africaine), à gauche, et Scutisorex somereni, à droite. ©FIELD MUSEUM
Quant à savoir quelle utilité pouvait avoir cette colonne vertébrale renforcée, cela demeure un mystère. « Elle semble conçue pour bloquer les mouvements latéraux de l’animal et augmenter sa rigidité. Mais, on ignore pourquoi », avoue Christiane Denys. Pour se protéger des prédateurs ? Ou peut-être pour avoir un accès privilégié à la nourriture ? « Certains chercheurs, dit Jean-Louis Hartenberger, ancien directeur de recherches au CNRS, auteur de “Une brève histoire de mammifères“ (Belin), ont fait l’hypothèse que cette échine très puissante permettait à l’animal de s’arcbouter et de soulever les écorces ligneuses des palmiers pour y dénicher son repas de vermisseaux et d’insectes. »
Difficile à attraper, vivant dans une région accidentée et politiquement très instable, Scutisorex n’est pas l’animal le plus facile à étudier et encore aujourd’hui, les chercheurs ignorent pratiquement tout de ses mœurs. Savoir à quoi lui sert cette échine hors du commun risque de prendre encore quelques années…
C’est une bestiole qui n’a l’air de rien. Une petite musaraigne africaine d’une douzaine de centimètres au très long nez. Pourtant, sous la peau du Scutisorex, au niveau de son dos, se niche une véritable incongruité de l’évolution: une colonne vertébrale totalement différente de celle qui nous équipe, nous humains. Beaucoup plus épaisse et aplatie, elle s’articule en plaques qui s’emboitent entre elles, lui conférant une sorte de carapace interne d’une robustesse étonnante! Le long du bassin du Congo se transmettent ainsi certaines histoires disant qu’il est possible se tenir debout sur le dos de ce petit mammifère sans qu’il en souffre.
« Scutisorex somereni » ©JULIAN KERBIS PETERHANS, FIELD MUSEUM
Deux chercheurs du Muséum d’Histoire Naturelle de Chicago (Etats-Unis) viennent de publier une étude en imagerie dans Proceedings of the Royal Society B. Ils ont passé au scanner tous les spécimens de cet animal présents dans leur collection : soit 13 de Scutisorex somereni et 3 de Scutisorex thori. En effet, seulement deux espèces de Scutisorex sont recensées dans le monde ! Et, d’ailleurs, avant 2013, une seule, S. somereni, était connue… Il fallut une publication dans les Biology Letters signée par une équipe internationale composée d’Américains, d’Africains, de Belges et d’un Allemand pour garnir cette maigre collection avec S. thori, un cousin proche vivant dans les mêmes coins et recoins des forêts tropicales humides du Congo. Et nommé ainsi en référence à la force légendaire du dieu nordique Thor. Car, cette dernière s’est également avérée être doté d’une épine dorsale hors du commun. Légèrement moins pourvue que celle de S.somereni -elle ne possède que 8 vertèbres lombaires quand son cousin en a 12-, la colonne de Scutisorex thori en possède toutefois les mêmes caractéristiques de résistance. « Mais pas exactement la même structure, analyse Christiane Denys, professeure au Muséum National d’Histoire Naturelle (Paris) et qui travaille sur l’évolution morphologique des petits mammifères africains. La comparaison des deux espèces, Scutisorex thori et Scutisorex somereni montre que celle de somereni est plus complexe. De plus, ses vertèbres sont davantage aplaties, comme s’il y avait une augmentation de cette tendance évolutive. »