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Médecine esthétique à l’étranger : attention aux risques et conséquences
Les offres pour renouveler son apparence tout en profitant pour voyager ne manquent pas, à en croire les sites, agences spécialisées et réseaux sociaux. La beauté low cost est en vogue, au point que le Conseil scientifique de la British Medical Association a lancé une alerte auprès des autorités sanitaires, en raison des complications liées à l’augmentation du nombre de personnes voyageant à l’étranger pour des opérations chirurgicales.
Pourquoi un tel engouement pour ce tourisme d’un nouveau genre ? L’influence des réseaux sociaux y est pour beaucoup. On souhaite que sa silhouette ressemble à celles montrées, qui paraissent si facilement accessibles que « tout le monde veut sa part de rêve », déplore le Dr Philippe Kestemont, chirurgien esthétique. « Quelque part, je les comprends, mais se faire opérer ailleurs peut avoir des conséquences dramatiques. »
Quelles sont les opérations les plus concernées par le tourisme médical ?
Les greffes capillaires ont un succès fulgurant ces dernières années, avec une fuite importante des patients vers des pays comme la Pologne ou la Turquie, indique le Dr Kestemont. En matière de chirurgie pure, on observe de nombreuses interventions de rhinoplastie, de prothèses ou liftings mammaires, et plus rarement des liftings du visage ou des abdominoplasties. Le secteur dentaire est lui aussi très concerné par les traitements low cost réalisés dans les pays de l’Est, comme la Roumanie.
Quelles différences avec la France ?
La première crainte d’un futur patient est de ne pas pouvoir choisir son médecin et l’établissement dans lequel il se fera opérer, contrairement à la France. À l’étranger, il rencontre souvent son chirurgien la veille de l’opération, sans possibilité de se retourner en cas de mauvais feeling.
En France, après un premier entretien permettant de poser toutes les questions nécessaires, un délai de réflexion de quinze jours, légal et obligatoire, est mis en place. Ce délai n’est pas toujours respecté à l’étranger.
Quels sont les risques du tourisme médical ?
Outre ceux liés à l’anesthésie générale, des effets secondaires immédiats sont possibles dans tous les cas, en France comme à l’étranger. Cependant, si de graves complications surviennent en France, tout établissement chirurgical a, sinon une unité de réanimation sur place, au moins un partenariat avec un centre hospitalier proche capable de fournir des soins adaptés. Ce n’est pas toujours le cas à l’étranger, ce qui peut mettre en jeu le pronostic vital du patient.
Dans des cas moins dramatiques, on peut tout de même observer des hématomes, des nécroses… « En France, c’est traité immédiatement et la douleur est prise en compte, » précise le Dr Kestemont. Mais les complications ultérieures peuvent surtout poser problème, comme l’insatisfaction des résultats ou des problèmes de cicatrisation. Dans ces cas, le praticien n’est pas sur place pour examiner le patient et l’aider.
De plus, reprendre l’avion après une opération peut augmenter le risque hémorragique et thrombotique. Enfin, il ne faut pas oublier que toute opération chirurgicale peut avoir un impact psychologique, et qu’à l’étranger, les proches et le médecin de famille ne sont pas là pour soutenir le patient après l’opération. La barrière de la langue peut également être handicapante.
Des opérations express et sans suivi
« Ce n’est pas que les praticiens sont mauvais à l’étranger, » indique notre expert, qui travaille avec des confrères tunisiens depuis longtemps. « Le plus gros problème, c’est le manque de suivi pré- et postopératoire lié à ces opérations express: pas d’analyse approfondie des antécédents médicaux avant l’anesthésie, et pas de suivi à long terme durant la phase de cicatrisation. Une infection peut tout à fait advenir en France, mais elle est traitée rapidement, que ce soit par un traitement oral ou une réopération, si besoin. »
En France, le suivi est souvent pris en charge par la Sécurité sociale ou réglé par l’assurance du chirurgien. La plupart des praticiens proposent un forfait « reprise » pour gérer les éventuels désagréments liés au postopératoire. Parfois, les problèmes d’implants mammaires, de couronnes ou facettes dentaires surviennent de longs mois après l’acte médical. Le patient a alors besoin de l’intervention rapide de son médecin.
Les opérations low-cost possibles en France
« On nous fait croire qu’on profite d’un séjour de rêve tout en améliorant son apparence. En réalité, après une opération, personne n’a ni l’envie ni la possibilité de s’exposer au soleil sur un transat devant une piscine, » souligne le Dr Kestemont. De plus, dans les pays de l’Est, le tourisme est souvent difficile.
Quant au gain financier qu’on nous fait miroiter, il est certes réel mais à nuancer. Il faut financer le voyage, le logement, les repas, et prendre en compte les risques évoqués, pour une différence de quelques centaines d’euros seulement, de plus si l’on compare avec un chirurgien renommé en France. « De nombreux jeunes chirurgiens bien formés pratiquent des tarifs raisonnables, et certains centres d’esthétique proposent même des tarifs réduits quand on réserve une opération en « last minute » » précise le chirurgien de Nice. « Quitte à profiter de tarifs low cost, autant le faire en France, avec plus de garanties. »
Notre expert : Dr Philippe Kestemont, chirurgien esthétique de la face et du cou, à Nice.
